Charlie Bregman : « de plus en plus d’auteurs autoédités nous prouvent que le succès est possible

Charlie Bregman a écrit plusieurs livres, tous autoédités. L’autoédition, pourquoi ? Comment ? Pour qui ? est le résultat de son expérience et d’une enquête en ligne menée auprès de 130 auteurs indépendants. Un ouvrage qui est à la fois un état des lieux et un guide pratique. Il l’a bien logiquement choisi pour participer à la Rentrée des indés, la rentrée littéraire des auteurs autoédités.

Parlons d’abord de votre livre. Pouvez-vous le résumer en quelques phrases ?

En France, l’autoédition a très mauvaise presse… Pour ne pas dire « pas de presse du tout ». Les médias font comme si elle n’existait pas.

Pourtant, de plus en plus d’auteurs autoédités nous prouvent que le succès est possible.

Parce que j’ai la chance d’avoir pu faire partie de cette communauté récente d’auteurs autoédités francophones dès l’émergence de l’autoédition numérique en France (le service d’autoédition d’Amazon, Kindle Direct Publishing, est arrivé en France en fin 2011 et je l’ai expérimenté en été 2012), j’ai voulu enquêter sur nos différentes motivations, nos objectifs, notre démarche qualité, nos stratégies pour nous promouvoir, et également nos résultats.

130 auteurs ont répondu généreusement à mon appel, pour un partage d’expérience d’une richesse inégalée, et surtout pour démontrer que l’autoédition, dans sa grande majorité, n’est ni de l’auto-publication ni de l’anti-édition. D’ailleurs, rien que cette année, de nombreux auteurs autoédités se sont fait repérer par des grands éditeurs, avec qui ils ont désormais signé.

C’est un livre qui traite du fond (le pourquoi), du comment (comment se faire connaître, comment publier des ouvrages de qualité…), et qui permet d’esquisser un profil type de l’auteur autoédité.

Quelle a été votre source d’inspiration, l’évènement qui vous a poussé à écrire ce livre ?

J’ai un blog que je consacre aux auteurs indépendants, afin de les aider à se faire connaître. Mais depuis un ou deux ans, j’ai pu constater une certaine baisse de solidarité, peut-être à cause des différences de points de vue ou de la multiplication des informations qu’il devient plus difficile de suivre, mais aussi, je crois, parfois par protectionnisme personnel, comme si participer à la reconnaissance d’un confrère revenait à perdre ses propres lecteurs.

Or, je pense au contraire que les lecteurs apprécient nos différences, et qu’en faisant bloc ensemble, nous les aidons à y voir plus clair dans la masse des nouvelles publications.

En lançant mon enquête par l’intermédiaire d’un long formulaire en ligne, mon idée était donc de rassembler nos énergies éparses autour d’un objectif commun : faire en sorte que l’autoédition accède à davantage de crédibilité, notamment vis-à-vis des journalistes, qui pratiquent aujourd’hui une censure bien suspecte au regard de certains succès absolument phénoménaux, ou de certains ouvrages, plus littéraires, qui demeurent pourtant de vraies pépites.

Une bonne raison de lire votre livre ?

Mon livre s’adresse à deux types de lecteurs, parce qu’il est à la fois un guide et un état des lieux de l’autoédition actuelle.

Si vous écrivez, ou que vous avez déjà publié un ou plusieurs ouvrages : découvrez comment l’autoédition peut être un tremplin pour vous.

Si vous êtes concerné par les changements liés à l’émergence de la lecture numérique : découvrez que c’est grâce à l’autoédition que certains auteurs peuvent désormais se féliciter de vivre de leurs publications… et adaptez-vous dès que possible pour devenir leurs partenaires, plutôt que d’en subir tôt ou tard les conséquences !

Pourquoi avez-vous choisi l’autoédition ? Avez-vous déjà publié par ailleurs chez un éditeur ?

J’ai choisi l’autoédition, au départ, parce que c’était confortable pour moi de faire connaître mes livres sans avoir à me faire connaître tout court. Je trouvais le défi plutôt grisant de pouvoir tout faire de A à Z en toute liberté, mais j’ai toujours pensé que ce que l’on écrit est plus grand que soi, et s’élève au-delà de l’égo, comme quelque chose d’essentiel qui nous relie aux autres.

Ensuite, un peu avant de me publier au format numérique, plusieurs éditeurs m’ont contacté, mais pas tous très sérieux, et le seul avec qui j’aurais probablement pu m’engager dans un partenariat était trop lent à créer la collection dans laquelle mon premier roman devait s’inscrire.

Aujourd’hui, je prends plaisir à publier librement, mais je ne suis pas naïf pour autant : éditeur est un vrai métier, et si j’avais l’opportunité d’en rencontrer un vraiment sérieux, je n’hésiterais probablement pas longtemps avant de lui confier ne serait-ce que le développement de mes formats papier, un créneau sur lequel je suis très mal positionné.

Parlons de vous : depuis quand écrivez-vous ? Comment vous est venue l’envie d’écrire ?

J’écris depuis l’âge de 13 ans, et j’ai aujourd’hui 41 ans. Pendant longtemps, je me suis familiarisé avec l’écriture et j’ai cherché mon style, tout en utilisant les mots pour affronter mes maux.

Avec le recul, je suis heureux d’avoir eu la décence d’avoir gardé ces écrits pour moi.

L’envie d’écrire pour les autres, pour partager du plaisir, de l’émotion, mais aussi de l’information avec eux, m’est venue beaucoup plus tardivement, quand je me suis senti plus serein dans ma tête et dans ma vie.

J’ai commencé en ouvrant un blog. Puis un deuxième, en collaboration avec un illustrateur : au rythme de 2 à 3 épisodes par semaine, pendant plus d’un an, le brouillon de mon premier roman a pris forme devant plusieurs centaines d’internautes chaque jour, qui m’ont encouragé à en faire un livre.

Avez-vous des rituels d’écriture ? Comment cherchez-vous l’inspiration pour vos livres ?

Avant, j’écrivais de manière très dispersée, sur tout et n’importe quoi, et donc n’importe quand.

Depuis que j’ai un semblant de ligne éditoriale, des rituels se mettent peu à peu en place.

Je peux d’ores et déjà reconnaître une certaine addiction au café, avec une écriture plus facile tard le soir ou dans la nuit, ou encore très tôt le matin avant de commencer ma journée.

Je suis intransigeant sur une chose : il me faut la solitude. Et généralement le silence, sauf pour la description de certaines scènes où écouter de la musique m’aide à rester dans un certain état émotionnel.

L’inspiration, pour la fiction, je la puise justement dans cet univers émotionnel qui est le mien. Mes drogues favorites pour y entrer plus facilement sont la musique, le cinéma, la danse, et toutes les formes de relations que je peux tisser au contact des autres.

Pour ce qui concerne mes guides pratiques, mon inspiration, c’est juste une connexion avec ma véritable nature : vouloir apporter une réelle valeur ajoutée à la vie des autres.

Quels sont vos auteurs favoris, ceux qui vous inspirent ou que vous considérez comme vos modèles ?

Pendant longtemps, j’ai eu comme modèles des plumes inégalables de la littérature classique, comme Lautréamont, Cioran, Kafka… Ensuite, j’ai eu des modèles contemporains comme Amélie Nothomb (une originalité indiscutable, et un style délicieux à souhait) ou encore Bernard Werber (un auteur qui a su garder sa curiosité originelle envers et contre tous). J’ai des goûts très hétéroclites et s’il y a un livre dans lequel je ne changerais absolument rien, c’est Le Petit prince de Saint-Exupéry.

Mais les modèles qui m’inspirent le plus, aujourd’hui, sont des auteurs de développement personnel (Deepak Chopra, Wayne W. Dyer…) ou des écrivains capables de bousculer l’état émotionnel de leurs lecteurs. Pour cela, j’aime particulièrement les livres d’Agnès Martin-Lugand…

Et ça tombe bien, puisqu’elle doit son succès au fait d’être passée par la case autoédition !

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui rêve d’écrire un livre mais jamais osé se lancer ?

Lâcher prise.

Viser l’amnésie par tous les moyens possibles et imaginables. Oublier tout ce qui a été entendu sur les bancs d’école, ne pas chercher à écrire un bon livre mais uniquement focaliser sur le fait qu’il va d’abord falloir l’écrire une première fois jusqu’à la fin pour ensuite avoir quelque chose à corriger pour en faire un livre !

Ensuite, je crois qu’il faut savoir se poser la question : est-ce que j’écris pour moi, ou est-ce que j’écris pour être lu ? Dès lors qu’on sait répondre à cette question, on se connecte à une intention. C’est toujours l’intention, qui porte le projet. Sans cette petite graine de départ, qu’il va falloir respecter plus que tout au monde, on peut tourner autour d’un désir mal compris pendant toute une vie, et ça ne débouchera sur rien de valorisant, ni pour soi, ni pour les autres.

Enfin, soyez connecté, en phase avec vous-même, inspiré. Ne cherchez pas à analyser, comprendre, ou disséquer : écrivez avec votre cœur, et pas avec votre tête. La tête, gardez-la bien froide : vous en aurez grandement besoin quand viendra le moment de vous corriger.

Et puis dès que vous vous sentez prêt, lancez-vous : ayez la ferme intention d’écrire le premier chapitre, et faites-le jusqu’au bout ! Si vous devez vous arrêter, préférez de le faire en plein suspens. C’est frustrant, mais cela vous évitera de vous heurter à une page blanche au moment de vous y remettre.

Si c’est la motivation, qui vous fait défaut, tâchez de vous entourer des personnes qui sont là pour vous booster, et non de celles qui vous encouragent à procrastiner.

L’autoédition, pourquoi ? Comment ? Pour qui ? est disponible sur le liste de Charlie Bregman, en format numérique à 3,99 €

À​ propos de la Rentrée des Indés :

Pour la première fois cette année, en écho à la rentrée littéraire orchestrée par les éditeurs, 40 auteurs autoédités se réunissent pour s’offrir une visibilité inédite pendant tout le mois d’octobre et toucher de nouveaux lecteurs.

Épaulés par Iggybook.com (la plateforme des auteurs indépendants), Actualitte.com (le magazine des univers du livre) et Babelio.com (la première communauté de lecteurs francophones), ils lancent LA RENTRÉE DES INDÉS 2015.

Découvrez-les sur le site de la Rentrée des indés 


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