Omar Benlaala : « l’autoédition n’est pas pour moi un choix par défaut »

Omar Benlaala est l’auteur de La Barbe, publié en janvier 2015 aux éditions du Seuil. Il participe à la Rentrée des indés avec Inspire, premier volet d’une trilogie de politique fiction qui décrit l’ascension au pouvoir "d’un jeune de quartier".

Parlons d’abord de votre livre. Pouvez-vous le résumer en quelques phrases ?

Inspire est un roman urbain. Il met en scène un jeune asthmatique, Gabriel Santo. Ce dernier décide de briguer le poste de maire du 20e arrondissement de Paris − son fief − et met sur pied un improbable braquage démocratique qui le consacrera en quelques jours.

Quelle a été votre source d’inspiration, l’évènement qui vous a poussé à écrire ce livre ?

Il y a plusieurs années, j’ai été contacté par un parti politique pour faire le lien entre ce que certains appellent les « jeunes de quartier » et un candidat à l’élection présidentielle. Ce que j’ai pu observer à cette occasion m’a convaincu d’écrire sur le pouvoir. La forme romanesque, qui m’offrait une grande liberté, s’est imposée. Celle du cycle aussi : les titres des trois volumes de la trilogie que j’ai imaginée ‒ Inspire, Expire, Meurs maintenant ‒ ne résument pas seulement nos existences ; ils illustrent la dynamique du pouvoir : Inspire représente l’accession aux responsabilités, Expire, le mandat, et Meurs maintenant le passage de témoin…

Une bonne raison de lire votre livre ?

Inspire a été mis en ligne en janvier 2015, alors que Michel Houellebecq publiait chez Flammarion Soumission. Comme lui, c’est un roman d’anticipation, de type politique-fiction, qui décrit l’irrésistible ascension d’un musulman jusqu’au pouvoir suprême. Mais Inspire renverse la perspective : son héros, Gabriel Santo, est issu d’un couple mixte ; son père est musulman et sa mère fervente catholique ; fort de ce double héritage, Santo impose à la société qui l’a mis en marge les aspirations de toute une génération…

Pourquoi avez-vous choisi l’autoédition ? Avez-vous déjà publié par ailleurs chez un éditeur ?

Inspire est mon premier texte. Je l’ai d’abord écrit pour me convaincre que j’étais capable de le faire ! Autodidacte, j’avais bien conscience de la difficulté… Le premier volume de la trilogie achevé, je n’ai même pas songé à le proposer à une maison d’édition. Par réflexe, je l’ai diffusé sur les réseaux sociaux ; il a plu. Une lectrice a même créé un site pour l’accueillir. Plus tard, lorsque Pierre Rosanvallon a lancé le projet « Raconter la vie », j’ai posté sous pseudonyme un court texte qui a attiré son attention. Il m’a alors demandé si je me sentais capable d’en faire un livre. La Barbe est sorti un an plus tard aux éditions du Seuil, sous un double format papier et numérique. J’ai profité de la visibilité que me donnait la promotion de ce récit pour déposer sur mon propre site une version plus aboutie d’Inspire. L’autoédition, à laquelle j’ai toujours cru, n’est donc pas – me concernant ‒ un choix par défaut.

Parlons de vous : depuis quand écrivez-vous ? Comment vous est venue l’envie d’écrire ?

J’écris depuis quatre ans, mais je me consacre à cet exercice depuis environ deux ans. L’envie m’est venue très tôt, au collège, à la lecture de Cyrano de Bergerac. Le sens de la formule de cet incroyable personnage, sa gouaille, sa grande humanité coincée entre force et faiblesse ont séduit l’adolescent fragile que j’étais alors. Mes premiers écrits remontent à cette période où, en amoureux acnéique, j’ai rédigé des lettres qui ne seraient jamais lues ; je n’ai pas « conclu », mais planté la graine qui donnerait ses fruits, 25 ans plus tard…

Avez-vous des rituels d’écriture ? Comment cherchez-vous l’inspiration pour vos livres ?

Ecrire de manière professionnelle ne s’improvise pas ; c’est un travail à plein temps qui exige une discipline de fer. J’ai la chance de profiter d’une imagination débordante qui constitue la matière première de mon inspiration, mais bien conscience que cela ne suffit pas à faire de moi un écrivain digne de ce nom. Mon principal rituel ‒ et celui que finalement je préfère, bien qu’il soit parfois douloureux ‒ consiste à me relire encore et encore (dictionnaire à l’appui), jusqu’à assécher mon texte, pour qu’il ne reste que du muscle.

Quels sont vos auteurs favoris, ceux qui vous inspirent ou que vous considérez comme vos modèles ?

Mon parcours religieux m’a d’abord conduit vers les mystiques, les moralistes et les écrivains philosophes, de Rûmî à Dostoïevski. Les formes brèves (aphorismes de Cioran, nouvelles de Poe, Conan Doyle ou Villiers de l’Isle Adam) me séduisent, et j’apprécie par-dessus tout les stylistes.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui rêve d’écrire un livre mais n’a jamais osé se lancer ?

De ne pas avoir peur ! De cultiver son envie jusqu’à ce qu’elle prenne vie, qu’importe la forme ; livre, article, tweet. Il faut bien se lancer ; le plus beau des hommes était à l’origine un spermatozoïde... Souvent, le cheminement importe plus que le résultat. J’ai commencé à écrire sans objectif ni limite avec, en poche, ma seule authenticité. Qui aurait cru que, fils d’analphabètes, déscolarisé à 14 ans, je serais publié par Pierre Rosanvallon aux éditions du Seuil sans avoir jamais envoyé le moindre manuscrit ? La Barbe s’ouvre sur cette phrase : « Les voies du Seigneur sont impénétrables… » ; ces mêmes mots amorcent certaines dédicaces, que je clos ainsi : « celles qui mènent à l’écriture, tout autant… ».

Inspire est disponible sur le site d'Omar Benlaala, en version numérique, à 2,99 €

À​ propos de la Rentrée des Indés :

Pour la première fois cette année, en écho à la rentrée littéraire orchestrée par les éditeurs, 40 auteurs autoédités se réunissent pour s’offrir une visibilité inédite pendant tout le mois d’octobre et toucher de nouveaux lecteurs.

Épaulés par Iggybook.com (la plateforme des auteurs indépendants), Actualitte.com (le magazine des univers du livre) et Babelio.com (la première communauté de lecteurs francophones), ils lancent LA RENTRÉE DES INDÉS 2015.

Découvrez-les sur le site de la Rentrée des indés


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